Mon nom est Eilian et je suis carrément fêlé du bocal. J'ai pas raconté de connerie depuis... Bah depuis deux secondes en fait parce que rien que le fait de dire « Bonjour, mon nom est Eilian et je suis carrément fêlé » est une chose folle en soit. Enfin bref. Par où je commence ? Le début probablement.

Alors, comme tout à chacun, je suis née du ventre de ma mère. Enfin, tout à chacun n'a probablement pas été conçu dans une éprouvette avec un spermatozoïde choisit parmi tous ceux qui avaient réussi à s'extirper d'un caillot de spermatozoïde après plusieurs heures dans une ultracentrifugeuse. Pour ce que j'en sais, mes deux parents avaient des problèmes qui les ont obligés à avoir recours à la fécondation in vitro. Pas la fécondation la plus romantique qui soit, mais qui pourrait expliquer pourquoi mes neurones s'articulent bizarrement ensemble.

Bref, donc si moi je suis née par cette voie bien médicalisé, ma petite sœur, allez savoir pourquoi, elle, n'a pas eu ce problème six ans après moi. Pire, elle a résisté à la pilule de ma mère et aux troubles de mes parents et s'est pointé de la manière la plus naturelle qui soit. Peut-être qu'elle était un super-spermatozoïde !

Enfin, je suis née à Cardiff, tout comme ma soeur, mais ce fruit du miracle a ruinée notre vie là-bas. Grossesse non désiré, forte envie de s'en débarrasser pour mon père qui n'avait jamais réussi à se sentir à l'aise avec la paternité - élevé un garçon était déjà une épreuve en soit, alors être responsable d'une fille... Son pauvre petit coeur ne l'a pas supporté -. Parce qu'il aimait ma mère, il est resté quatre ans, mais du jour au lendemain, il nous a abandonné, pour aller se vautrer avec sa secrétaire. Alors, après quelques mois de déprime, ma mère a décidé de tout plaquer et de tout recommencer ailleurs. Adieu Cardiff, ville de mon coeur, adieu les potes et les proches et bonjour Springfield, mamie Brown et ses bisous baveux. Oui, maman est retournée vivre chez sa mère et en célibataire accomplie suite à son divorce d'avec grand-père dix-huit ans plus tôt, la Germaine a tout fait pour que maman ne désire pas très vite retrouver le prince charmant.

Alors évidemment après, il faut imaginer ma vie, coincée entre trois filles toutes plus barges les unes que les autres. Une grand-mère tellement Gaga qu'elle ferait peur à la lady du même nom, une mère en rage contre le sexe masculin - pauvre de moi - et une frangine avec pour seul but ultime dans la vie de me rendre l'existence insupportable. J'aurais eu tôt fait de déjanter et de me pendre avec le fil dentaire dans la salle de bain si je n'avais pas rencontré Joshua au collège.

Entre ce brave garçon et moi, ça a tout de suite collé genre comme avec de la super-glue-trois-mille-puissance-un-milliard. Avec Josh on a fait les pires conneries. On en a passé des heures à courir pour éviter les ennuis. Faut dire que mes idées sont souvent en contradictions avec ce que les adultes estiment être convenable. Mais que voulez-vous, c'est drôle de balancer des bombes à encre du toit du collège au sortir d'un conseil de classe, vous ne croyez pas ? Enfin, tout ça pour dire que durant mon adolescence, je finis par passer plus de temps dehors et avec Josh qu'à la maison de grand-mère. On était pas devenue seulement potes de conneries, mais vraiment amis. Le genre d'amis qui peuvent se parler librement de tout, qui peuvent toujours compter l'un sur l'autre quelque-soit le problème, l'envie, le besoin. Et ça passait entre autre par le fait que Josh comprenait parfaitement qu'à la maison, c'était pas si cool que ça et que j'étais bien mieux à squatter sa chambre et sa console que chez moi.

Enfin, soyons clairs, je n'étais pas maltraité, au contraire. Ma mère et ma grand-mère m'adoraient. J'étais devenu le seul homme de leur vie, le seul qui en vaille la peine et elles comptaient sur moi pour relever le niveau de mes paires masculins. Quant à ma sœur... Et bien elle restait ma sœur. Chiante au possible, adorant se moquer de mes relations amoureuses, venir m'ennuyer dans ma chambre quand je faisais mes devoirs. Bref, une véritable chieuse qui pétait un boulon dès qu'on osait dire du mal de moi - elle seule s'étant attribuée ce droit exclusif - et que j'aurais défendu bec et ongle. Mais aussi trépidante soit une telle vie, le jeune homme que j'étais à l'époque avait vraiment l'impression de vivre un véritable enfer par moment et le besoin de fuir la maison était intense.

Immédiatement après le lycée, Joshua et moi quittâmes nos nids familiaux pour nous installer ensemble. Joshua débuta ces études de chef cuisto, pendant que moi, je m'attelais à apprendre l'enseignement. Et pas n'importe lequel. Celui des enfants. J'adore être entouré par des gamins, jouer avec eux, leur apprendre des choses, comme lire, écrire, ou les valeurs à défendre... Je n'ai pas mis bien longtemps à découvrir que l'enseignement en maternelle était ce qui me bottait le plus. S'il est parfois difficile de parler livre et art cinématographique avec ces petits bouts, le vrai chien foufou que je suis adore parler et leur apprendre des choses plus basiques comme l'écriture de leur prénom, la différence fondamentale entre le père Noël et le père Fouettard, ou encore l'avantage certain que représente le fait de toujours capturer deux sangliers pour l'équilibre d'Obélix quand il marche. Oui, il n'y a pas à dire, les jeunes enfants ont des réflexions très profondes qui m'apportent chaque jour une compréhension grandissante des lois fondamentales de l'univers...

Aujourd'hui, ma vie actuelle n'est pas bien différente de celle d'alors. Je suis toujours en collocation avec Joshua, qui est toujours profondément amoureux de la petite Maxine. Je suis instituteur en maternelle et j'adore mon boulot. Ah et il y a une petite blondinette dans l'histoire. Magnifique, charmante, avec un sourire à vous damner un saint. Je vous la présenterais peut-être un jour, si vous êtes sage... et si elle l'accepte.

Voilà donc hum... Je m'appelle Eilian et je suis carrément fêlé. Mais avoué qu'avec mon histoire, vous comprenez quelques détails du pourquoi et vous avez conscience que dans mon boulot, ça peut toujours servir.